JE SUIS VENU TE DIRE QUE JE M’EN VAIS… (scénario court-métrage)

SCÉNARIO D’UN COURT-MÉTRAGE A LIRE GRATUITEMENT EN PDF
 
1        CARTON
 
MARS 2013 EN BANLIEUE PARISIENNE
 
2        EXT. JOUR – UNE MAISON BOURGEOISE. BANLIEUE PARISIENNE HUPPÉE
(Toutes les séquences seront filmées du point de vue de LAURA. Caméra subjective.) Tous les flash-back (sonores ou visuels) sont produits par Laura.
 
Décor : Une grande maison cossue à étages en pierre meulières de 1910 nichée dans la verdure.
 
Laura fixe la maison, puis elle tourne la tête vers la droite. Sous un abri pour deux véhicules, stationne une voiture de sport.
Au loin, on entend une voiture puis quelques rires brefs et décousus d’enfants joueurs.
 
Lentement, Laura tourne la tête sur la gauche et s’attarde sur un arbre imposant et touffu. Elle observe ses grandes feuilles dentelées qui frissonnent sous l’effet d’une brise légère.
On entend le bruissement des feuilles, et le gazouillement d’un oiseau que Laura ne voit pas mais qu’elle cherche des yeux parmi les branches.
 
Lentement, Laura tourne son regard vers la maison et fixe la porte d’entrée fermée.
 
3        EXT.JOUR – UNE MAISON BOURGEOISE. BANLIEUE PARISIENNE HUPPÉE 
 
Laura se rapproche doucement de la maison et se dirige vers la porte d’entrée. On entend ses pas sur les graviers.
Simultanément, une voix féminine fredonne le refrain de la chanson « Je suis venu te dire que je m’en vais… » de Serge Gainsbourg. Le rythme est mélancolique et le ton est monocorde.
 
4        EXT.JOUR – UNE MAISON BOURGEOISE. BANLIEUE PARISIENNE HUPPÉE – DEVANT LA PORTE D’ENTRÉE
 
Hésitation de Laura devant la porte. Avec un léger grincement, la porte s’ouvre toute seule et révèle une pièce sombre.
 
5        INT. JOUR  MAISON – HALL D’ENTRÉE
 
Laura entre à l’intérieur, accompagnée du même refrain « Je suis venu te dire que je m’en vais… » en fond sonore.
La porte se referme dans son dos. On entend le même grincement qu’à l’ouverture, puis le bruit de la penne s’ajustant dans la serrure.
 
6        INT. SOIR MAISON – HALL D’ENTRÉE
Flash-back sonore et visuel
 
Boris arrive sur Laura qui vient de franchir le seuil de la maison. On reconnaît le hall d’entrée, mais avec une lumière du soir.
Le regard d’un fou, Boris lève le bras et gifle Laura d’une main puissante.
 
BORIS
(Furieux)
C’est à cette heure-ci que tu rentres, espèce de petite trainée ?
 
Impact de la gifle. La tête de Laura se déporte sur la droite.
 
7        INT. JOUR  MAISON – HALL D’ENTRÉE
 
MARS 2013
Silence…
 
L’intérieur est obscur. En opposition avec la clarté du dehors.
 
Laura s’avance dans le hall parfaitement rangé et décoré de meubles anciens, massifs et austères.
Elle pivote sur la droite et contemple un tableau de taille moyenne, accroché au-dessus de la console Napoléon. Elle s’attarde sur la toile représentant un bouquet de fleurs aux pétales déployés. Les couleurs sont éclatantes (jaune vif et rouge carmin). Le dessin est naïf, presque enfantin.
 
Laura regarde la signature « Laura » écrite en lettres arrondies et s’achevant sur une petite marguerite symbolique.
 
Laura baisse la tête. Son regard balaye la console et se pose sur l’unique cadre photo en plexiglas incurvé, placé à l’extrême droite. On y voit le visage de deux jeunes mariés amoureux et souriants.
La femme a une jolie bouche teintée de rouge discret. Son menton fin et ses longues mèches brunes ornent ses épaules dénudées. À hauteur de poitrine, elle tient un bouquet de lys blanc entre ses doigts croisés, manucurés de rose. Lui, brun et coiffé en arrière, a un physique plus banal, mais le sourire carnassier.
 
Laura décale son regard sur le faire-part protégé par un sous-verre, à proximité du cadre en plexiglas. Dessus, une inscription en lettres dorées « Mariage de Boris et de Laura, le 5 juillet 2008« . Simultanément, on entend le refrain (fredonné) qui reprend. « Je suis venu te dire que je m’en vais… »
 
8        INT. JOUR  MAISON – HALL D’ENTRÉE/BIBLIOTHÈQUE
 
Laura se dirige dans le fond de la pièce et tourne sur sa gauche.
 
ENCHAÎNÉ
 
9        INT. JOUR MAISON – BIBLIOTHÈQUE
 
Laura arrive dans une grande bibliothèque aux volets entrebâillés et décorée de meubles dans un style identique à ceux du hall d’entrée. Hormis un fauteuil renversé sur son dossier, la pièce paraît être en ordre. À droite, sur les étagères pleines à craquer de livres neufs et anciens, rien ne dépasse, rien ne déborde.
 
Laura regarde au sol. Deux livres ouverts sur l’envers et un qui est fermé. Elle s’attarde sur les titres lisibles en couverture. « Crime et châtiment » de Dostoïevski, « Les illusions perdues » de Balzac et « Thérèse Raquin » de Zola.
 
Laura relève les yeux et fixe le fauteuil chaviré.
 
10      INT. JOUR MAISON – BIBLIOTHÈQUE
Flash-back sonore
 
On perçoit l’écho du fauteuil tombant sur le parquet, suivi d’une chute d’objets. Le bruit se mélange au grincement de meubles poussés ou déplacés. à une respiration féminine forte et haletante, à des geignements retenus, puis à des pas rapides.
BORIS
(Furibond)
Viens ici ! Reviens, sale petite pute !
 
11      INT. JOUR MAISON – BIBLIOTHÈQUE
 
MARS 2013
Silence…
 
Laura regarde un 2ème tableau accroché sur le côté gauche de la pièce. C’est à nouveau une gerbe de fleurs, mais les teintes sont rose vif et rose poudrée. On retrouve le même trait de pinceau enfantin du précédent tableau ainsi que la signature de Laura avec la marguerite. La peinture a cependant, plus de profondeur et davantage de nuances de couleurs que la première.
 
Laura baisse la tête. Son regard se porte sur une vieille poupée de chiffon à la tête arrachée et gisant sur le sol.
 
12      INT. SOIR MAISON – BIBLIOTHÈQUE
Flash-back sonore et visuel
 
Le visage contracté, Boris brandit devant lui la vieille poupée de chiffon.
 
BORIS
(Menaçant)
J’en ai marre de la voir, cette fiche poupée ! Il serait temps que tugrandisses, ma pauvre fille!
 
LAURA
(En pleurs)
Non… Laisse ma Titite… Boris. S’il te plait… Je t’en prie, ne lui fais pas de mal…
 
BORIS
Tiens ! Regarde ce que j’en fais de ta « Titite » de merde ! Regarde bien !
 
Craquements et bruits de tissu déchiré.
 
LAURA
Non… Boris, arrête… Je t’en supplie… ARRETE…
 
13      INT. JOUR. MAISON – BIBLIOTHÈQUE
 
MARS 2013
Silence de quelques secondes…
 
Laura reprend le refrain « Je suis venu te dire que je m’en vais… ». sur un ton monotone, puis le refrain en musique s’associe à sa voix. Le volume augmente graduellement, pendant que fredonnant, Laura tourne lentement et deux fois de suite autour de la poupée décapitée.
 
Soudain, un bruit de pas venant d’en haut lui fait lever les yeux, puis traverser le plafond pour se retrouver à l’étage.
 
14      INT. JOUR  MAISON – CHAMBRE DE BORIS ET LAURA
 
Laura se retrouve dans une grande chambre aux volets entrebâillés, devant un lit « King size« .
 
Silence…
 
Laura est immobile.
Regard bref sur la toile horizontale au-dessus du lit parental et signée Laura avec la marguerite. Sans comparaison avec les peintures du maître, les couleurs des fleurs chamarrées font néanmoins, penser à du « Gauguin ».
 
Doucement, le refrain en musique reprend . « Je suis venu te dire… »
 
Laura regarde le lit froissé. Elle se concentre sur le drap du dessus et la couverture qui pendent sur le côté et s’étalent en partie sur le sol, puis sur la table de chevet à la gauche du lit. Dessus, une lampe boule et un téléphone fixe sur lequel le chiffre « 1 » clignote en rouge pour signaler un message.
 
Sans bouger de sa place, Laura tourne la tête vers la gauche en direction de la fenêtre ouverte aux volets semi-fermés. Les voilages ondulent et s’entrelacent. Sifflement brusque du vent. Le courant d’air soulève les rideaux qui claquent brièvement.
 
Soudain, un bruit de pression d’eau. Laura tourne la tête sur la droite et se retrouve dans la SDB sans fenêtre, attenante à la chambre.
 
15      INT. JOUR. MAISON – SALLE DE BAINS
 
Face à Laura, un homme brun de dos à la coupe mi-longue. De taille moyenne, il a de larges d’épaules, une chemise blanche ouverte et les manches retroussées jusqu’aux biceps. Penché sur le lavabo, on ne peut voir son visage dans le miroir, mais on visualise son grand front et de longues mèches brunes. Ses bras s’agitent dans un mouvement laissant supposer qu’il se nettoie les mains. Soudain, l’homme sursaute et se retourne brusquement.
 
L’homme, d’une trentaine d’années, est à moins de deux mètres de Laura. Il est figé par la peur et respire très vite. On voit sa poitrine se soulever.
 
Laura s’attarde sur son visage. Elle considère d’abord ses petits yeux noirs, puis son regard descend sur sa mâchoire carrée et ses lèvres fines et nerveuses, puis remonte sur son front suintant barré de cheveux collés par la transpiration.
 
Flash de Laura
 
Durant une fraction de seconde, Laura voit la photo des mariés sur la console de l’entrée, et fait le lien entre l’homme de la photo et l’homme face à elle.
 
Flash-back sonore
 
Le visage collé à celui de Laura et les mains entourant l’ovale de son visage, Boris s’adresse à sa femme sur un ton autoritaire.
 
BORIS
 Tu m’aimeras toujours ? Hein ? Tu me quitteras jamais ?
 
LAURA
 Non Boris… Bien sûr que je ne te quitterai jamais…
 
BORIS
 Tu le jures ?
 
LAURA
(À voix basse)
 Je le jure…
 
BORIS
 Tu sais à quoi tu t’exposes, si tu pars ?
 
LAURA
 (Dans un souffle)
Oui…
 
MARS 2013
 
Silence…
 
Chemise ouverte, le regard de Laura se pose sur le torse de Boris. Elle s’attarde sur sa peau blanche, presque laiteuse, puis sur les gouttes de sueur sur sa poitrine imberbe.
Le regard de Laura descend sur la ceinture à sangle de cuir fauve retenant son blue-jean.
 
Flash-back
 
Placé devant le pare-douche en verre fumé de la baignoire, Boris a le bras au-dessus de la tête. La boucle enfermée dans sa main droite, il tient un ceinturon. Les yeux haineux, il frappe Laura qui reste hors champ. On entend les cris de la victime et le claquement de la ceinture de cuir qui la fouette.
 
BORIS
Ça t’apprendra à moins faire la   maligne, espèce de petite pute !
 
LAURA
Non Boris. Non… (Temps) S’il-te-plait, non…
 
Laura s’est accroupie sur le carrelage. On voit Boris en contre-plongée.
Laura sanglote et gémit tout en parant les coups de ceinture à l’aide de ses avant-bras et de ses paumes ouvertes.
 
16      INT. JOUR  MAISON – SALLE DE BAINS
 
MARS 2013
Silence…
 
Laura regarde Boris en pied. Il porte des gants ménagers noirs pour gros travaux qui recouvrent les 3/4 de ses avant-bras. À sa main droite, il tient une éponge à récurer. Son blue-jean est tacheté d’eau et il est chaussé de vieilles espadrilles foncées.
Après quelques secondes à rester sans bouger, Boris se retourne vers le lavabo. Sans bienveillance, avec une moue de dégoût, il s’observe dans le miroir. On entend la forte pression de l’eau qui coule du robinet.
Dans le reflet de la glace, on aperçoit une larme couler sur sa joue. Laura suit le trajet de la goutte qui roule sur le visage de Boris.
 
Le refrain monocorde chanté par Laura, reprend. « Je suis venu te dire… »
 
Tête inclinée, Boris referme le robinet et s’appuie au lavabo. Il se courbe en avant, puis se laisse glisser jusqu’à s’agenouiller sur le sol à côté d’un seau vide en fer blanc. La tête sur les genoux, il agrippe sa nuque de ses mains resserrées et sanglote doucement.
 
Laura cesse de fredonner et regarde Boris en silence. Elle voit son corps secoué par les pleurs qui augmentent en intensité.
 
17      INT. JOUR MAISON – CHAMBRE DE BORIS ET LAURA
 
Le téléphone de la chambre sonne et Laura se transporte aussitôt devant le lit défait. Sans bouger, elle regarde l’appareil qui sonne à quatre reprises.
 
Le répondeur se déclenche. On entend la musique d’intro original de « Je suis venu te dire… », puis la voix enjouée de Laura qui chantonne à capella en reprenant l’air.
 
VOIX (chantonnée) DE LAURA
« Nous sommes venus vous dire qu’on n’est pas là. Comm’le dit pas Verlaine, on reviendra. On est venus vous dire, n’hésitez pas… à laisser un message… on rappellera….
 VOIX (parlée) DE LAURA
Merci et à bientôt ».
 
Après trois « bips » successifs, une voix d’homme mûr, chaude et douce s’enregistre sur le répondeur et résonne dans la chambre. Au ton de sa voix, on sent de l’inquiétude.
 
PÈRE DE LAURA
Allo, ma chérie, c’est papa… Ça fait longtemps qu’on n’a plus de tes nouvelles… Tu nous manques, à maman et à moi… On se                                       languit de toi mon petit cœur. On espère que tu vas bien…  N’oublie pas ma chérie qu’on t’aime et qu’on t’aimera toujours.
 
MÈRE DE LAURA
(S’interposant)
Oui, ma beauté, donnes-nous de tes nouvelles. Ça nous manque de ne plus te parler, mon amour… Un petit coup de fil, ce serait gentil…
 
PÈRE DE LAURA
Allez, mon petit lapin. Je vous embrasse, toi et Boris.
 
MÈRE DE LAURA
Oui ! Grosses bises ma beauté et bonjour à  ton mari !
 
Le « bip » sonore, indique la fin de l’enregistrement.
 
Silence de quelques secondes, puis reprise du refrain chanté par Laura.
 
Boris débarque dans la chambre. Il porte encore ses gants ménagers et tient le seau en fer blanc dans sa main droite. Les yeux rouges et l’air hagard, il titube comme un homme saoul.
 
Le téléphone sonne à nouveau. Après le message d’accueil, on entend une voix d’homme dynamique et d’âge moyen.
 
CHRISTIAN DELCOURT
Boris ! Les chinois ont changé les clauses du contrat, rappelez-moi en urgence !
 
Boris pose le seau à la hâte et file décrocher le téléphone.
 
BORIS
Allô Christian ! Oui, c’est Boris !
 
Boris s’est assis sur le lit. Jambes écartées et posture dégagée, il écoute son patron lui exposer les faits, tandis que restée à la même place, Laura l’observe en silence. Nerveux, elle le voit gesticuler. Puis, de plus en plus attentif à ce qu’il entend au téléphone, il se détend, passe de l’étonnement au sourire franc, acquiesce aux propos de Christian Delcourt et répète les instructions.
 
BORIS
Jeudi en 8 ? Pas de problème, Christian ! C’est bon pour moi!
(Temps)
 Demain-matin, 7h 45 pétantes au bureau ? Pas de souci, chef !
(Temps)
Mais bien sûr que tu peux compter sur moi !
(Temps)
Enfin voyons, tu me connais Christian ?
(Rires)
Allez, salut. A demain chef, chef….
(Rires)
 
Boris raccroche et instantanément, son dos se courbe et ses épaules tombent en avant. Tête baissée, il regarde le sol. Il reste qqs secondes dans cette position, puis se remet debout. Le corps contracté, les sourcils froncés et les lèvres pincées, il fixe l’angle gauche de la chambre et s’y dirige.
 
Laura, toujours immobile, le voit passer devant elle et le suit du regard, tandis qu’il marche vers la fenêtre semi-ouverte. Au passage, il effleure les rideaux qui volètent et font des vagues.
 
Boris pivote sur sa gauche et se plante devant le dressing. Laura s’approche de lui, se place dans son dos et reste silencieuse.
 
Flash-back sonore et visuel
 
Boris tient un grand ciseau dans la main. Le sourire cynique, il le montre à Laura avant de se retourner vers la penderie grande ouverte, d’empoigner les robes de la jeune femme et les découper avec rage devant elle.
 
BORIS
Tiens ! Regarde ce que j’en fais de tes fringues ! Regarde !
 
 
On entend les coups de ciseaux, les cintres qui tombent les uns après les autres, et les pleurs retenus de Laura.
 
MARS 2013
 
Boris ouvre la penderie et met la main sur une grande housse à vêtement. On entend le zip de la fermeture éclair qu’il fait lentement glisser. Délicatement, il écarte les pans et en dégage une robe de mariée accrochée sur son cintre. Le jupon de la robe est en tulle, et le corsage en broderie fine est parsemé de perles nacrées. Une couronne de fleurs ivoire et vert pastel, est cousue sur la ceinture en satin vert d’eau de la robe de princesse.
De sa main gantée de caoutchouc, Boris caresse le jupon virginal, puis dans un geste empressé, il  le saisit à pleines mains et enfonce son visage dans la tulle.
On perçoit quelques râles de Boris et des plaintes étouffées.
 
18      INT. NUIT MAISON – CHAMBRE DE BORIS ET LAURA
 
Flash-back sonore
 
On entend l’écho de rires festifs, de verres qui s’entrechoquent, de bouchons qui sautent et de « je t’aime » joyeux.
Silence…
Flash-back sonore et visuel
 
BORIS
(Menaçant)
Maintenant, tu es as moi ! A moi ! Tu as compris ?
 
LAURA
(Apeurée)
Oui, Boris… j’ai compris. Mais qu’est-ce qui te prends tout-à-coup ? Tu me fais peur, chéri…
 
BORIS
(Voix qui devient de plus en plus forte)
Je te fais peur ? Ça tombe bien parce qu’il va falloir que tu te mettes dans le crâne que MAINTENANT qu’on est mariés et que les règles vont changer ! Pour commencer, tes parents, je ne VEUX plus les voir ici ! Compris !?
 
LAURA
Mais enfin, je ne comprends pas… Pourquoi ? Qu’est-ce qu’ils t’ont fait ?
 
BORIS
Ça me regarde ! Discute pas !
 
LAURA
Mais… Pourquoi, tu me fais ça ?
 
BORIS
Y’a pas de MAIS ! Et cherche pas à comprendre, c’est comme ça et pas autrement, que ça te plaise ou non !
 
LAURA
(Sanglote doucement)
Je… Je…
 
BORIS
Commence pas à chialer, et de toute façon, t’es bien trop conne pour comprendre ! Alors, tu fais ce que je te dis et boucle-là !
 
Fou de rage, Boris pousse rudement Laura qui est projetée en arrière.
 
LAURA
(Gémit)
Boris ? Mon Dieu, Boris…
(Temps)
Mon Dieu…
 
19      INT. JOUR MAISON – CHAMBRE DE BORIS ET LAURA
 
MARS 2013
Silence…
 
Boris a le visage dans le jupon de tulle. On ne l’entend plus, mais on voit ses doigts se resserrer autour du tissu qu’il tire d’un geste sec et arrache du cintre en bois qui tombe au sol dans un bruit rebondissant. La robe dans la main, Boris se redresse et se retourne face à Laura.
Les yeux de glace et les lèvres pincées, il passe devant elle en traînant la robe de cérémonie derrière lui comme s’il traînait un sac de pommes-de-terre.
À hauteur du seau, il fait une boule de la robe, et la tasse pour la faire rentrer dedans. Malgré son acharnement, le tulle volumineux déborde du seau.
Après un rapide état des lieux, Boris récupère la cale de porte en acier et la met sur la robe repliée tant bien que mal. Le poids de la cale bloque en partie l’expansif jupon et le retient de s’échapper totalement du récipient.
À la suite, Boris défait la couverture du lit en la tirant vers lui. Il la jette sur son épaule à la manière d’une toge romaine, puis saisit l’anse du seau et quitte la pièce d’un pas lourd et décidé.
 
20      INT. JOUR MAISON – COULOIR 1ER ÉTAGE
 
Laura suit Boris dans le couloir. Il a la tête dans les épaules et marche vite. A ce moment, Laura fredonne la musique sans les paroles de « Je suis venu te dire… »
 
Sur le pan de mur de droite, elle pose un regard furtif sur une nouvelle toile signée de sa main. Celle-ci représente un bouquet de fleurs fanées dans un vase brisé. Contrairement aux autres peintures, les couleurs sont délavées, et n’ont ni nuances ni profondeurs.
Non loin du tableau, une porte fermée attire l’attention de Laura qui s’en approche. En plein milieu de la porte, un trou béant et des éclats de bois de la largeur d’un poing.
 
Silence…
Flash-back sonore.
 
BORIS
(Hurlant)
Ferme-la ! Mais ferme-la ta grande gueule ! T’entends ?
 
LAURA
Mais je…
 
BORIS
Quoi « Je » ? Boucle-là avant que je t’éclate !
 
On entend le bruit d’un crâne cogné contre un mur, puis le cri déchirant d’une femme, suivi d’un coup violent donné sur un panneau de bois et le perforant.
 
21      INT. JOUR MAISON – ESCALIER
 
MARS 2013
Silence…
 
Laura rattrape Boris qui s’engage dans l’escalier étroit et se positionne derrière lui. Elle concentre son regard sur le seau qui se balance et frappe le mur, puis sur la couverture glissant sur les marches en velours rouge telle une longue traine.
 
Laura reprend le refrain d’une voix douce : « Je suis venu te dire que je m’en vais… », puis chante plus fort lorsque son regard se pose sur un cinquième tableau de fleurs peint par elle. Accroché aux trois-quarts de l’escalier, le coup de pinceau sur cette toile est beaucoup plus fin et plus maîtrisé que sur celui des quatre précédents. Les détails y sont aussi plus précis. En revanche, les pétales racornis ou fanés au pied des tiges, sont ternes et maussades. Marron et gris sont les couleurs principales de cette toile déprimante.
 
Flash-back sonore.
 
BORIS
Pardon Laura.
 
BORIS
(Ton de repentance)
Pardon chérie. Pardonne-moi, je ne sais pas ce qui m’a pris. Je ne recommencerai plus, je te le jure.
 
BORIS
Pardon à toi.
Pardon à la femme la plus belle et la plus merveilleuse qui soit.
Tu es quelqu’un d’exceptionnel et je ne te mérite pas. Pardonne-moi mon amour.
Pardonne-moi pour tout le mal que je t’ai fait…

BORIS
(sanglote)
Sans toi, je ne suis rien, et si tu me quittes, je me tue.
(Temps)
Je t’aime tellement. Pardon de tout gâcher, mon amour.
Je te promets de faire des efforts, je te le promets.
Les nombreuses excuses de Boris, ainsi que les promesses non tenues et répétées au cours de son martyr, se mélangent dans l’esprit de Laura. Ses paroles en boucle créent du désordre dans sa tête, et s’ensuit alors un méli-mélo de « pardons ».
BORIS
Pardon, je suis trop con…
(suppliant)
… J’ai pété les plombs, mais je te demande sincèrement pardon…
… Pardonne-moi. Je te promets que je vais me calmer… que ça va aller.
Oui, ça va aller…
(sanglotant).
Pardon, je t’aime. Je ne veux pas te perdre...
… Pardon chérie, mille fois pardon…
(amoureux)
 
Le pire des « pardons » était le « pardon culpabilisant ». Celui qui rajoutait du malaise à la douleur de Laura.

LAURA
Je n’en peux plus Boris…
(Pleurs)
Je n’en peux plus… Il faut que ça cesse…
 
BORIS
(Il hausse le ton)
Ok, j’ai dérapé, mais t’avoueras que tu y es aussi pour quelque chose !
T’as le don de me faire sortir de mes gonds. Reconnais-le, merde !
 
22      INT. JOUR – MAISON – HALL D’ENTRÉE
 
MARS 2013
Silence…
 
Laura suit toujours Boris. Arrivé dans le hall d’entrée, il se débarrasse de la couverture et du seau devant la première porte à sa gauche. La porte est fermée.
 
Laura reprend le refrain tranquillement : « Je suis venu te dire… »
 
23      INT. JOUR MAISON – BIBLIOTHÈQUE
De son même pas lourd et décidé, Boris s’introduit dans la bibliothèque. Sans retirer ses gants ménagers, il relève le fauteuil renversé, le remet à sa place avant d’aller ramasser les livres tombés à terre. Il les range soigneusement sur l’étagère, puis récupère la poupée déchirée qu’il tient du bout des doigts comme un objet dégoutant.
 
Laura chante plus fort. « Je suis venu te dire… ». Elle regarde Boris qui a le visage dur et jette la poupée sur la couverture, avant de tourner les talons et sortir de la pièce.
 
24      INT. JOUR MAISON – HALL D’ENTRÉE
 
Boris retire la robe de mariée du seau dont il agrippe la ‘anse d’une main ferme.
 
Silence…
 
Laura suit Boris qui  se dirige vers la porte d’entrée, mais bifurque sur la droite. Il entre dans la cuisine,  remplit le seau au robinet de l’évier et quitte la pièce.
 
25      INT. JOUR MAISON – HALL D’ENTRÉE
 
Sur les talons de Boris, Laura est silencieuse. Elle le voit se diriger vers la porte où il avait laissé la couverture et la robe de mariée, les pousser du pied pour se frayer un chemin et ouvrir la porte d’un geste sec.
 
Laura chantonne : « Je suis venu te dire… »
 
26      INT. JOUR MAISON – BUREAU
 
C’est un bureau sobre, peu meublé et peu éclairé. Les volets sont entrebâillés. Sur le mur d’en face, en arrière de l’imposant siège bureau de cuir noir, une fleur moribonde, peinte sur un fond blanc marbré de coups de pinceau cendres et noirs. De la taille de celui du hall d’entrée, le tableau se détache légèrement dans la pénombre.
La toile est hyper réaliste. Au premier coup d’œil, on voit que l’artiste maîtrise son art. On remarque que le dessin est beaucoup plus net et le trait plus affirmé. Seulement, le dessin fait froid dans le dos.
C’est une fleur unique peinte au milieu du néant. Représentée couchée et recroquevillée, nue, ses pétales à terre et semblables à des perles de sang, elle se meurt.
 
Le refrain se poursuit sans variation de ton.
 
Boris laisse la porte grande ouverte, mais Laura reste sur le seuil. Elle le voit retirer sa chemise et se mettre à quatre pattes.
Laura baisse la tête et remarque des empreintes de pieds. Des pieds qui auraient marché dans un mélange de peinture rouge, jaune et verte.
 
Silence…
 
Le regard de Laura revient sur Boris qui trempe son éponge dans l’eau du seau et nettoie le sol.
 
Flash-back sonore
 
On entend des objets plastiques et métalliques chuter sur le parquet.
 
BORIS
(Très énervé)
Mais qu’est-ce que tu as encore foutu ? Mais c’est pas possible ! Tu me fais vraiment chier avec ta nouvelle passion !
 
LAURA
Je ne l’ai pas fait exprès…
 
BORIS
(Enragé)
Tu ‘es vraiment qu’une grosse conne !
Tu en as fichu partout de ton truc de merde ! Si j’avais su, je t’aurais dit « non », au moins, tu serais restée tranquille ! J’ai voulu être sympa avec toi et voilà le résultat ! Décidemment, t’es bonne à rien ! Tu n’es même pas bonne à baiser ! Ah, si je m’écoutais pas, je te !
 
LAURA
(Paniquée)
Non, ne m’approche pas Boris… M’approche pas, je te dis… Me fais pas mal…
 
Placée derrière, Laura ne voit pas ce que Boris est en train de frotter, mais elle voit son éponge plonger plusieurs fois dans le seau et, au fur et à mesure, l’eau qui change de couleur. Le liquide clair prend une teinte orange délavée, puis orange soutenu. À mesure que Boris essore son éponge dans le seau, l’eau se fonce de plus en plus jusqu’à devenir rouge sang.
 
Soudain, une rai de soleil venant de la droite de la pièce, éclaire le petit périmètre que Boris astique avec ardeur. Laura tourne la tête vers cette lumière naturelle et examine l’autre pièce qui a une porte commune avec le bureau.
 
La porte n’est ouverte que partiellement, mais on ne peut voir la destination de cette pièce gorgée de soleil. Laura fixe son regard sur l’entrebâillement, et regarde les vagues de peintures disgracieuses et irrégulières, les traces de doigts et les contours de mains en peinture qui maculent un mur blanc à l’origine.
 
Laura revient sur Boris qui se relève. Trempé de sueur, il s’éponge le front avec son avant-bras et sort du bureau, le seau à la main.
 
Silencieuse, Laura marche à sa suite.
 
27      INT. JOUR MAISON – CUISINE
 
Boris retourne dans la cuisine. Il vide son seau dans l’évier, rince l’éponge et s’essuie les mains sur un torchon. D’un pas mécanique, il rejoint la bibliothèque.
 
28      INT. JOUR MAISON – BIBLIOTHÈQUE
 
Boris prend un bloc-notes et un stylo dans un tiroir de l’étagère à livres, puis il s’assied dans un fauteuil de cuir vert-anglais. Le carnet sur les genoux et le stylo bille tenu curieusement entre ses doigts caoutchoutés, il note. Placée au-dessus de son épaule, Laura voit la liste s’écrire et, simultanément, on entend le crissement de la plume.
– Vider la poubelle – Jeter la veille poupée de Laura – Brûler la robe de Laura – Se débarrasser des débris – Acheter une pommade cicatrisante – Acheter des sacs à gravats de 300 litres – Réparer la pelle à gros travaux – Faire les courses pour la fin de semaine…
 
Flash-back sonore
 
Assis sur son fauteuil de cuir vert-anglais, Boris fume une cigarette. Il a une feuille entre les mains. Très énervé, il interpelle Laura d’une voix forte.
 
BORIS
On vient de recevoir les résultats du test !
Pfft… ça confirme ce que je pensais !
 
Laura s’approche de lui.
 
LAURA
(Indignée, elle bafouille sans hausser le ton)
Quoi ? Mais Boris, tu…
(Temps)
… tu as encore ouvert mon courrier personnel…
 
BORIS
Oui, et j’ai sacrément bien fait ! Je suis sûr que tu m’aurais caché ton infertilité !
 
LAURA
(Sanglote)
Quoi ?
Tu dis quoi ?
C’est écrit que je suis infertile… Que… que je ne pourrais pas avoir d’enfant… C’est ça ?
 
BORIS

Oui, c’est ça !
Cause « Endométriose ». C’est leur terme à eux, mais ça veut bien dire ce que ça veut dire !
Décidément, tu ne sers à rien ma pauvre fille !
Tu n’es même pas capable de me faire des gosses ! Pfft !
 
LAURA
(Voix faible et larmoyante)
Infertile, ce n’est pas stérile…
(Temps)
Peut-être qu’il y a une solution…
(Temps)
Peut-être que ce n’est pas définitif… Peut-être que…
 
BORIS
Non !
Pas de solution ! T’es bouchée ma parole !
T’es une terre sèche ! Une terre sèche !
 
LAURA
(Dans un murmure à peine perceptible)
De toute façon, c’est mieux comme ça…
Boris se relève brusquement et attrape le bras de Laura.
 
BORIS
Qu’est-ce que tu dis ? Qu’est-ce que tu viens de dire ?
 
LAURA
Rien…
 
Avec des yeux de sadique, Boris approche sa cigarette du bras de Laura.
 
BORIS
Comment ça rien ! Tu crois que j’ai pas compris ! Hein ? Tu crois que j’ai pas compris que tu préférais qu’on n’ait pas de gosses !


Laura fixe la bouche tordue dans un rictus de Boris. Elle hurle et s’évanouit.
 
MARS 2013
Silence…
 
Boris se lève.
Pas à pas, Laura avance derrière lui. Elle le voit déposer son papier sur l’étagère de livres et ressortir de la pièce.
 
29      INT. JOUR MAISON – CUISINE
 
On suit Boris qui retourne à la cuisine. Il se penche sous l’évier et récupère un grand sac poubelle noir, une bouteille d’essence de térébenthine et une bouteille d’alcool à brûler qu’il dépose dans le seau vide.
Il repart en direction du bureau et ré-enfourne la robe de mariée avec la cale dans le seau qu’il a débarrassé des bouteilles dont il déverse le contenu sur la robe. À la suite, il attrape la couverture restéet sur le sol. Il la coince comme il peut sous son aisselle et serre le sac poubelle, en boule dans son poing.
 
Silence…
 
30      INT. JOUR MAISON – BUREAU
 
Boris traverse son bureau et rejoint la pièce adjacente située sur sa droite. Il ouvre la porte en grand et on découvre un atelier de peinture dans une verrière en alcôve.
Contrairement aux autres parties de la maison, cette pièce est éclairée par la lumière naturelle du dehors.
 
31      INT. JOUR MAISON – ATELIER DE PEINTURE
 
Flash-back sonore
 
À peine Laura a-t-elle franchi le seuil de l’atelier, qu’on entend ses hurlements et ses suffocations.
 
BORIS
(Fou furieux)
Je t’avais prévenu !
Je t’avais prévenu que s’il te prenait l’envie de me quitter, t’en subirais les conséquences !
 
LAURA
(Suppliante)
Non… Non… Non… Oh Seigneur !
Non… Fais pas ça… Fais pas ça… je t’en supplie…non…
 
MARS 2013
Silence…
 
Sur le côté droit, à proximité du chevalet aux pieds cassés et appuyé contre un mur, une palette de peintre en miettes et du petit mobilier habillé de couleurs modernes ou en instance de relooking. Il y a aussi de grandes traces de peinture rouge, jaune et verte sur le carrelage mosaïque, sur les murs blancs et sur les vitres. Et partout, des tubes de gouache écrasés, des pots « spécial bois décapés » renversés et vomissant leur contenu, d’étranges éclaboussures et d’autres stigmates encore frais qui suintent encore. C’est un carnage !
 
À deux reprises, on entend un bruit élastique et énergique. Laura tourne la tête vers l’origine du bruit et voit Boris qui retire ses gants de caoutchoucs, puis frotte ses avant-bras pour retirer les salissures déjà sèches de peinture bleue.
 
Laura scrute les griffures sur sa peau. Il y en a beaucoup. Certaines sont profondes et sanguinolentes.
 
Reprise du refrain par Laura d’une petite voix chagrin : « Je suis venu te dire… »
 
Boris fixe le sol et Laura en fait de même. Elle voit à ce moment-là, le corps inerte d’une jeune femme aux boucles brunes, à demi-nue. Le visage et la poitrine de la morte aux yeux ouverts sont barbouillés de peinture rouge, jaune et verte. Sa tête est tournée sur le côté, du côté où Boris se tient. Sa gorge présente de nombreuses traces de strangulations, de grosses ecchymoses et des marques de doigts violacées.
 
À coté de sa tête, une chaine en or cassée et une croix dorée sur laquelle le soleil se reflète et reproduit le dessin en ombre agrandie sur le mur d’en face. Muette, Laura s’attarde sur cette ombre projetée.
 
Silence…
 
On voit Boris en contre plongée, à la place de Laura étendue morte sur le sol. De ce point de vue, Boris paraît immense et menaçant. On le voit fourrer le sac poubelle dans sa poche de blue-jean, déplier la couverture coincée sous son aisselle, la tendre devant lui et la jeter sur le corps de Laura pour le recouvrir. A ce moment, tout devient noir comme si la couverture était sur le spectateur (caméra).
 
32      CARTON
 
3 ANS APRES EN BANLIEUE PARISIENNE.
 
33      EXT.JOUR – UNE MAISON BOURGEOISE. BANLIEUE PARISIENNE HUPPÉE
 
De l’extérieur, la maison a très peu changé. Les massifs et les fleurs sont différentes, tout comme la voiture break garée sur le côté. Ces infimes détails ne sautent pas immédiatement aux yeux du spectateur. À quelques détails près, on pourrait se croire trois ans et quelques mois en arrière.
 
34      INTER.JOUR – HALL D’ENTRÉE
 
L’intérieur, en revanche, est tout autre. Le mobilier est contemporain. On y voit quelques éléments de décoration design et des peintures aux murs claires et vives.
 
 
35      INT. JOUR MAISON- BIBLIOTHÈQUE devenue SALLE-À-MANGER
 
On avance dans l’ancienne bibliothèque.
La pièce est maintenant une salle-à-manger dans laquelle, un homme, une femme et deux enfants (garçon et fille) prennent leur repas du midi.
On se positionne derrière la femme qui est attablée face au téléviseur. Le garçon d’une dizaine d’années porte une salopette rouge et une marinière à manches courtes. La fillette, un peu plus âgée, est vêtue d’une robe blanche garnie de cerises rouges. L’homme, assis près de la femme mange avec bon appétit. C’est un trentenaire avec une barbe épaisse et une chemise bleu ciel.
 
La femme qui semble être la mère est de dos. Elle a des boucles brunes, une robe jaune à bretelles et de belles épaules. Ses cheveux noirs et sa physionomie mince font penser à Laura.
 
À table, l’ambiance est festive. Tout le monde parle en même temps, tandis que la télé diffuse les informations de la mi-journée. Derrière la femme, on regarde la journaliste à la télé qui s’exprime et montre des chiffres sans que personne n’y fasse vraiment attention.
La famille fait beaucoup de bruit. Soudain, la mère pousse un petit cri et demande le silence.
 
MÈRE DE FAMILLE
(bat des mains)
Chut ! Chut ! Taisez-vous!
 
PÈRE DE FAMILLE
(Étonné)
Pourquoi ? Qu’est-ce qui se passe ?
 
MÈRE DE FAMILLE
Je ne sais pas. J’ai senti quelque chose de bizarre sur mon épaule. C’est comme si quelqu’un m’avait touché.
 
PÈRE DE FAMILLE
Touché ? Mais comment ça ?
 
Après un bref silence, les enfants recommencent à fanfaronner autour de la table. Agacée, la mère de famille doit insister plusieurs fois pour que tout le monde se taise.
 
MÈRE DE FAMILLE
(Ton ferme)
Mais chut à la fin !
Ça suffit, taisez-vous !
 
Les fourchettes se posent et les bouchent se ferment, et dans le calme, le message de la journaliste à la télé qui n’intéressait personne auparavant, devient tout à coup, audible.
 
JOURNALISTE
En France, une femme sur 10 déclare avoir subi des violences conjugales. En France, une femme meurt tous les 2 jours sous les coups de son compagnon.
 
A la fin de cette déclaration, le refrain monocorde de Laura reprend. « Je suis venu te dire… »
 
La mère semble être la seule à avoir entendu ce chant dans son dos. En panique, elle se lève précipitamment de sa chaise et se retourne. On la voit, face caméra, la bouche ouverte et les yeux écarquillés, et ce n’est pas Laura.
 
Fin
 
36      GÉNÉRIQUE DE FIN
 
 
37      CARTON
 
Lamentations 3:17 
Tu m’as enlevé la paix ; je ne connais plus le bonheur.
 
 
 
Chanson « Je suis venu te dire que je m’en vais ». (Paroles et musique de Serge Gainsbourg) https://www.youtube.com/watch?v=gx5ohjYAIPY
 
(interprétation Cœur de pirate) – « Je suis venu te dire que je m’en vais »
 
Je suis venu te dire que je m’en vais
 
Et tes larmes n’y pourront rien changer
 
Comm’ dit si bien Verlaine, au vent mauvais
 
Je suis venu te dire que je m’en vais
 
Tu t’souviens de jours anciens et tu pleures
 
Tu suffoques, tu blêmis, à présent qu’a sonné l’heure
 
Des adieux à jamais Ouais je suis au regret
 
D’te dire que je m’en vais Oui je t’aimais, oui mais
 
Je suis venu te dire que je m’en vais
 
Tes sanglots longs n’y pourront rien changer
 
Comm’dit si bien Verlaine au vent mauvais Je suis venu te dire que je m’en vais
 
Tu t’souviens des jours heureux et tu pleures
 
Tu sanglotes, tu gémis à présent qu’a sonné l’heure
 
Ouais je suis au regret D’te dire que je m’en vais /Car tu m’en as trop fait.
 
 
 
 
 
 

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